Les tricots de Coco

La semaine dernière, je me suis offerte une petite virée au magasin Noz, où j'aperçois cette belle valisette renfermant un kit de tricot:

• une paire d'aiguilles à tricoter
• une pelote de laine
• un livre intitulé "Les tricots de Coco"

La raison me dit: "tu as déjà quantité de livres, revues, modèles de tricot dans les armoires, pourquoi l'acheter sans savoir si les modèles qui s'y trouvent sont beaux"

Le coeur me dit: "oh une si belle valise girly, le tout pour 6.95€, je trouverai de toute façon quelque chose à me plaire à l'intérieur"

Allez hop, embarquée. Et quel ne fut pas mon bonheur lorsque j'ai ouvert ce livre, et commencé par lire la préface d'Anna Gavalda!

Un texte magnifique, qui parlera à toutes les personnes qui aiment créer de leurs doix doigts.

Voilà pourquoi j'ai souhaité vous le partager ici.

"Le plus que nous pouvons.

Peut-être les idéalisé-je, peut-être nous idéalisé-je, mais j'ai la faiblesse de croire que les créateurs manuels - expression assez laide, pardon, je remaille - que les doigts agiles, que les coeurs à l'ouvrage, que les bricoleurs d'étoiles, égaliseurs de pompons et autres petits Poucets en perles et sequins se situent toujours un peu au-dessus de la nué; qu'ils s'élèvent à chaque fois qu'ils se penchent et qu'à force de plisser les yeux, ils y voient bien plus clair.

Car les mains, quand elles sont ainsi occupées, empêchent la langue de s'effilocher. Les conversations sont plus gaies, plus tendres et mieuxveillantes. On ne peut pas baver sur la voisine quand on est sans cesse en train d'humecter un brin de coton perlé, c'est assez compliqué d'embrouiller le monde quand on a justement sa pelote à démêler et ça n'aurait aucun sens de l'amocher alors même qu'on essaie de l'embellir dans un tambour... Oui, vous allez me reprocher d'idéaliser, je le sens.  Et toutes ces mégères, alors, qui, la bouche pleine d'aiguilles, ont passé leur vie à cancaner, à biaiser et à défaire?

Ah, oui... mais elles n'avaient pas le choix, elles. Elles devaient coudre, elles devaient tricoter, elles devaient ravauder, alors que nous... Nous, nous ne sommes obligées de rien! L'économie de notre maisonnée ne dépend pas de notre coupe de dé et nous ne rapiéçons aucune misère. Nous, nons petites choses, là... c'est... c'est de la poésie!

De l'art brut, de la thérapie douce, des promesses, des bêtises, des cadeaux!

Je suis émerveillée par l'amitié, la complicité, la fraternité, même, des âmes manuelles entre elles. C'est comme si les blogs avec leurs photos et tous leurs festons de commentaires en chaîne avaient été inventés pour elles... Je suis émerveillée par Les Tricots de Coco et tous ses liens, je suis émerveillée par Coupe Couture et tous les siens.

Quel patchwork, quel marquoir, quel magnifique écheveau... Ah! Si le poète avait su... Sa ronde, en vérité ne tenait qu'à quelques fils!

A propos de tous les gars du monde, justement, on en revient toujours, enfin moi, j'en reviens toujours (désolée pour le grand écart, mais c'est un travers très fréquent chez nous autres, simples bobines... à force de laisser notre esprit divaguer par-dessus l'ouvrage, nous devenons libres), j'en reviens toujours, disais-je, à cet extrait de la lettre adressée par Albert Camus aux japonais après le carnage des bombes atomiques: "(...) tout ce que nous pouvons faire est d'ajouter à la création, le plus que nous pouvons, pendant que d'autres travaillent à la destruction (...)"

Aussi naïf, aussi déplacé, aussi nunuche que cela puisse paraître, je suis convaincue qu'une promesse de cordon de laine, s'échappant lentement d'un tricotin d'enfant est une réponse à... à je ne sais pas quoi exactement, mais une réponse. Et une forme de résistance. Alors, tissons, brodons, lions, assemblons et nouons.

Ajoutons le plus que nous pouvons"

Anna Gavalda

En plus le livre se présente ensuite comme un calendrier, où chaque mois offre une citation, la présentation d'une matière (mohair, alpaga, lin...) et différents modèles a réaliser en tricot, crochet ou couture.

Une dépense qui valait vraiment le coup. Un livre que j'adore!